Depuis de nombreuses années je remarque que l’énorme éléphant qui trône sur le mur de mon salon attire immanquablement les enfants de passage. Alors même qu’ils ne marchent pas encore, ils sollicitent les bras d’un adulte pour le voir de plus près, pour le toucher. Plus âgés, nos jeunes bipèdes se plantent seuls devant lui et l’observent.
La création des photographies de la série Pile ou Face* est donc partie de l’envie de montrer cette indéniable attraction de l’enfant pour l’animal. Le choix du photomontage s’est très vite imposé comme le moyen d’expression me laissant l’entière liberté de création pour transcrire ces émotions enfantines. J’ai donc picoré ici et là dans ma photothèque personnelle des images oubliées, exploré les zoos et autres parcs animaliers et rassemblé les différentes pièces de chaque puzzle pour réaliser des univers oniriques, décalés et colorés où le monde réel laisse la place à un monde rêvé…comme par exemple celui de voir sortir une tête de paon de son encrier d’écolier, de croiser une vache mangeuse de carambar, de faire une partie d’échecs avec un zèbre sur une route désaffectée, ou bien encore de soigner un perroquet dans un hôpital de brousse…
J’ai, comme beaucoup d’enfants, grandi avec les contes de Grimm et de Perrault, chanté avec Mooglie, pleuré avec Lassie et Sheeta, rêvé avec Aglae et Sidonie, déguisé le chien de ma grand-mère, adoré la vache limousine,…Aujourd’hui j’ai pris un plaisir fou à revenir sur ces traces, à décaler sans censure, à disproportionner avec excès, à associer l’impossible, à m’amuser des complicités entre l’animal et le petit d’homme. Dans ces madeleines j’ai croqué goulûment avec la jubilation de tirer les ficelles de ces marionnettes vivantes, car enfin… tout cela n’est finalement qu’un jeu de construction, un jeu d’enfant quoi…Pile OU Face ?
* en tant qu’observateur nous voyons un animal de face et un enfant de dos. En réalité l’enfant et l’animal sont face à face ! dans un tête à tête intime.